Ce jeudi 9 juin, le journal télévisé de 19h de RTL nous gratifiait d’un reportage sur la journée des huissiers de justice, visible ici à 34min.
On y montre une tournée de l’huissier Stany Georges en précisant bien qu’il s’agit d’une tournée de saisie.
Problème
Selon moi, les débiteurs sont clairement identifiables, à un JT de 19h sur RTL!
Exemples avec ces captures d’écran tirées du reportage:
Premier plan sur une maison unifamiliale, où l’on peut lire le numéro de la maison, puis plan dégagé sur la rue:
Pour peu que l’on habite le patelin, on reconnait clairement!
Idem ici avec maison + plan sur la rue:
Et encore ici avec ce bâtiment bien reconnaissable:
Et où l’huissier explique après que la dame est malade etc., donc pour peu que l’on soit voisine, je trouve ça bien assez que pour reconnaitre l’individu concerné!
Le plus drôle, c’est la voix off qui dit:
Une approche délicate, discrète…
ah oui, on a rarement vu plus discret! :D
Rappel:
Il y a des règles bien particulières qui régissent la matière de recouvrement de créances (à lire ici), notamment pour la protection de la vie privée.
Il est interdit:
La loi sur le recouvrement interdit à l’article 3, § 1er, tout comportement ou pratique qui :
1. porte atteinte à la vie privée du consommateur;
Voilà. À la place des personnes concernées dans le reportage, je signalerais directement ce brave huissier qui n’a pas trop réfléchi avant d’accepter de tourner ce reportage pour RTL…
Le truc qui me fait bien rire dans l’histoire c’est que ce sont les mêmes rédactions qui vont balancer sur la vie privée sur Facebook, Google street view, etc. etc.
PS: je n’ai rien contre RTL, si ça se trouve, ils ont fait la même boulette à la RTBF.
Commentaires
4 réponses à “Protection de la vie privée, notion floue chez RTLinfo”
J’avoue que c’est une situation délicate qui peut prêter à discussion…
Tout d’abord, le champs d’application rationae materiae de la législation que tu cites se cantonne uniquement aux recouvrements à l’amiable. Dans le reportage ci-dessus, on ne connaît pas la nature des démarches de l’huissier, mais au vu de la résolution négociée dans le cas de la deuxième maison, on peut supposer qu’effectivement c’est du recouvrement à l’amiable. Si on était dans une situation où l’huissier avait un titre exécutoire (jugement du tribunal des saisies), la dite législation ne s’appliquerait pas et peu importe l’esclandre que cela créerait.
Par ailleurs, la législation, cette fois-ci sur le champs d’application rationae personae, ne porte que sur la protection du consommateur. Il s’agit donc des cas où un particulier a réalisé un acte juridique avec un commerçant, pour un usage privé. Or, dans le cas de la seconde maison visitée, il s’agit du recouvrement d’un impôt, la législation en question n’est donc pas applicable.
Cela étant, ce n’est pas parce que la législation que tu cites est inapplicable, qu’on peut faire tout ce qu’on veut. En effet, l’huissier de justice doit respecter le « recueil des règles de déontologie pour les huissiers de Justice ». Dans ce recueil, on retrouve un devoir de secret propre à la profession. Par ailleurs, dans le Code Pénal, en son article 246, la profession d’huissier de justice est clairement visée et donc un huissier se doit de respecter le secret professionnel. Détail important : c’est une disposition d’ordre public, c’est-à-dire que même si le client renonçait à son droit d’être protégé par le secret, on en aurait cure, la violation du secret serait quand même punie.
Alors toute la question est : « est-ce que le fait de montrer la situation géographique vague d’un individu est une violation du secret ? » ; « est-ce que la violation du secret se réfère à donner des éléments qui permettent à n’importe qui d’identifier quelqu’un ? Ou est-ce que le seul fait de donner des éléments suffisants pour qu’un proche du débiteur puisse identifier le dernier constitue déjà une violation ? ». Cette question du degré peut-être débattue.
Personnellement je trouve le cas très limite. Car même si une autorisation de filmer avait été donnée, le secret est comme je l’ai dit d’ordre public. Par ailleurs, bon nombre d’éléments permettent aux gens du coin d’identifier de qui on parle : les huissiers officient dans des secteurs géographiques déterminés, donc en donnant le nom de l’huissier on circonscrit une zone géographique ; dans le cas de la 3e maison, on a le nom de famille « Jacquet » sur la sonnette et la porte d’entrée est facilement identifiable, sans compter le numéro de la maison (304).
Bref, c’est très limite et si l’initiative était sympa pour faire connaître un peu le job des huissiers (même si ça ne se résume absolument pas à opérer des saisies), cela a été réalisé un peu maladroitement. La faute n’est pas clairement établie, mais la Chambre des Huissiers pourrait bien rappeler ce professionnel à l’ordre pour qu’à l’avenir cela ne se répète pas.
Merci pour se rajout d’information
Marrant j’ai lu article aujd indiquant que le type ayant fait un DOS sur le site de la TEC a été interpelé à cause d’un reportage fait par RTL … hahahaha !
Salut belle kréature.
Je suis de temps en temps ton blog mais c’est la 1ere fois que je me permet de réagir car je connais cet huissier, c’est le suppléant (remplaçant) de ma mère. Normalement, c’est elle qui devait être dans le reportage mais elle était indisponible ce jour là, bref.
Les huissiers doivent D’ABORD demander un autorisation à la Chambre Nationale des Huissiers de Justice de Belgique (Ordre des médecin, mais version Huissiers) avant tout reportage, émissions, parutions, etc….
Et si c’est accordé, c’est toujours à titre exceptionnel. De plus, un huissier n’a pas le droit de faire de la pub. C’est très réglementé et les huissiers sont bien placés pour savoir ce qu’ils peuvent faire ou non.
Je n’ai pas eu l’occasion de voir le reportage, mais si certains éléments permettent d’identifier les personnes concernées, la faute incombe aux journalistes d’RTL-TVI. Cependant, le fait que cela soit diffusé pendant le « Journal », donne plus de droits aux journalistes me semble-t’il.
C’est devenu un fait d’actualité (discutable, certes), et dans ce cas le droit à l’information prime sur le droit à l’image. De plus, les journalistes sont resté sur la voie publique !
Finalement, les journalistes ont peut-être eu l’autorisation des concernés.
Et puis, par rapport aux voisins, on repère tout de suite un huissier dans une rue. Comportement, sacoche d’huissier, etc…
Ils ne doivent pas non plus faire ça dans le secret le plus total. Par contre, ils ne peuvent pas révéler l’identité du débiteur, ni expliquer le contenu des dossiers, etc…
Si tu veux plus d’infos, n’hésite pas à me contacter, je transferai à ma « maman ».
Bonne journée.